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Élaboration de la prochaine saison, gestion des conditions sanitaires d’accueil... Les structures programmant théâtre, concerts, danse, arts du cirque et de la rue s’affairent, avec la ferme volonté
 de recevoir à nouveau le public. Mot d’ordre : se réinventer. 

Incertitude et inventivité en coulisses 1 © Laurent Rousselin / Amiens Métropole
Tant pour sa programmation en intérieur que pour le festival La Rue est à Amiens, le pôle national cirque est touché par la crise sanitaire.
© Laurent Rousselin / Amiens Métropole

27.05.2020

JDA 945

« Une saison martyre », prévient déjà Ikbal Ben Khalfallah. Pour le directeur du Safran, la saison culturelle 2020-2021 avec le report, quand c’était possible, des spectacles annulés depuis le 17 mars est élaborée « sans visibilité. En juin, il n’y aura ni présentation de saison ni même programme. On se laisse la possibilité d’être réactif. Notre ouverture à l’international complique les décisions : certaines représentations planifiées en octobre sont déjà reportées ». Dans toutes les structures de notre territoire, la même prudence prime. Maison de la culture, Comédie de Picardie, Maison du théâtre, Cirque Jules-Verne, Lune des pirates, Zénith, centres culturels Picasso, Jacques-Tati, Léo-Lagrange et Étouvie : tous guettent les directives gouvernementales dans l’attente de rouvrir leurs portes. Dès le 17 mars, ils étaient sur le pont pour gérer les annulations en cascade, trouver des solutions avec les artistes, caler d’autres dates... Et « reprogrammer au chausse-pied » – la formule est du directeur de la Maison de la culture Laurent Dréano –, les spectacles dans un calendrier ordinairement ficelé dès mars... Soit la moitié de la saison pour la Comédie de Picardie, une vingtaine de représentations pour l’espace culturel Picasso. Et l’ensemble des shows prévus jusqu’à juin au Zénith. À La Lune des pirates, « 90 % de la programmation de l’automne prochain sera celle initialement prévue ce printemps », précise son directeur Antoine Grillon. Qui garde à l’esprit que tout peut encore basculer : « Nous avons une épée de Damoclès au-dessus de la tête ».

 

Incertitude et inventivité en coulisses 2 © Noémie Laval

Laurent Dréano, directeur de la Maison de la culture, imagine son parvis comme un possible lieu de spectacle.

© Noémie Laval

 

LE CASSE-TÊTE DES REPORTS

« Avant septembre, on ne sera pas prêts », résume Charlotte Goasgen, directrice du centre culturel Léo-Lagrange. Les programmes et présentations de saison de toutes les structures attendront donc, au mieux, la rentrée. Alors que le confinement stoppait net l’ouverture des Safra’Numériques (du 17 au 21 mars) et d’Amiens Tout-monde à la Maison de la culture (du 16 au 26 mars), La Rue est à Amiens se préparait à investir la ville du 12 au 14 juin. « Ce moment de partage aurait été le bienvenu après deux mois de confinement », regrette Cécile Duval à la communication du Cirque Jules-Verne. « Nous espérons un report en septembre mais restons prudents. Tout dépend des conditions et de l’adaptabilité des spectacles. La question du rapport avec le public et des gestes barrières reste encore difficile à juger. Nous avons trop d’inconnues pour accueillir dans de bonnes conditions près de 300 artistes. Ce que nous proposerons doit rester agréable pour tous... »

 

Incertitude et inventivité en coulisses 3 © Laurent Rousselin / Amiens Métropole

Les Safra’Numériques en mars dernier : le début d’une longue liste d’annulations.

© Laurent Rousselin / Amiens Métropole

 

S’ADAPTER POUR OUVRIR

Chacun en est donc à échafauder des plans. En ayant en tête la problématique de l’accès aux salles, par exemple pour la tenue d’ateliers. Au Safran, les horaires pourraient ainsi être élargis pour s’adapter aux flux réduits. La Lune des pirates, qui a renoncé à l’édition 2020 de son festival Minuit avant la nuit en juin au parc Saint-Pierre, fait les calculs : « Si l’on suit les préconisations actuelles, c’est une personne pour quatre mètres carrés. On tomberait à une jauge de 50, compte Antoine Grillon. Notre priorité est d’ouvrir mais il faut aussi avoir un plan B pour conserver notre rôle dans la filière des musiques actuelles ». « J’imagine mal le théâtre avec le port des masques, sans proximité et sans se toucher », constate pour sa part Jean-Louis Estany, à la tête de la Maison du théâtre. Mais il ne se résout pas : « Nous devrons collectivement mener des réflexions pour trouver des solutions, continuer à travailler et exister ». Pas d’abattement non plus chez Laurent Dréano, qui se dit prêt à rouvrir en public réduit la Maison de la culture : programmées en mars, les expositions Pangea et A_tiste sont restées en place. Et pourraient être visitées en respectant les gestes barrières.

 

Incertitude et inventivité en coulisses 4 © Laurent Rousselin / Amiens Métropole

Le Zénith jongle avec les calendriers pour reprogrammer à partir de septembre les dates supprimées.

© Laurent Rousselin / Amiens Métropole

 

PROPOSER DES ALTERNATIVES...

Les professionnels du spectacle savent n’avoir d’autre choix que de se réinventer. Question de survie. Du côté de la Comédie de Picardie, son directeur Nicolas Auvray « souhaite à tout prix faire vivre le théâtre ». Et envisage pour cela toutes les solutions : rouvrir « même pour 50 spectateurs », accueillir des petits formats « dès septembre dans notre belle cour ». Laurent Dréano regarde aussi vers l’extérieur : « Certaines formes pourraient prendre possession du parvis de la Maison de la culture pour retrouver la magie du spectacle ». Et vers les nouveaux modes de diffusion : « Nous réfléchissons avec l’Orchestre de Picardie à un concert à huis clos retransmis sur Internet ». Ce volontarisme, on le retrouve dans les propos de Nacera Nakib, directrice de l’espace culturel Picasso, qui a récemment intégré la gestion du centre culturel Saint-Exupéry à Glisy : « Il faut proposer des alternatives avant que l’on nous impose des protocoles ». Par exemple en dispatchant ses prochains événements – Kidanse, les Rencontres musicales et Pics’arts – pour diluer les publics. Du côté du centre culturel Léo-Lagrange et de la Maison du théâtre, ancrés dans le quartier Saint-Leu, la réflexion intègre la dimension sociale avec le souci de reprendre contact avec la population. « Nous imaginons des interventions en pas-de-porte pour livrer des menus artistiques à domicile », dévoile Charlotte Goasgen.

 

... ET RECRÉER DU LIEN

« Ce quartier populaire a vécu difficilement cette période. Il y a eu comme une coupure existentielle, déplore Jean-Louis Estany. Il faut recréer du lien. Nous imaginons notre réouverture dans des lieux décentrés pour rencontrer les gens. » Les structures culturelles ont choisi de se battre. Et le public attend impatiemment leur réouverture. Pour un appel d’air salvateur.

//Ingrid Lemaire

 

Quand les billets achetés se transforment en dons

Le remboursement des billets pour les spectacles annulés est bien sûr prévu. Quand la date est reportée, on peut aussi choisir de garder sa place. Le Safran et le centre culturel Jacques-Tati vont proposer à leurs adhérents le remboursement d’un trimestre sur
 les ateliers. Une option à laquelle l’espace culturel Picasso réfléchit aussi, tandis que la Maison de la culture examine le remboursement ou le report des abonnements de cette saison à celle de l’année prochaine. Ici, comme à la Comédie de Picardie, à la Maison du théâtre ou à Jacques-Tati, le public a également la possibilité de transformer l’achat de son billet en don pour soutenir les artistes et les techniciens, très durement impactés. « Certains spectateurs ne se sentent pas d’être remboursés, précise Nicolas Auvray, à la Comédie de Picardie. Ces sommes seront affectées pour aider le domaine artistique. » Dans tous les cas, il est conseillé de se rapprocher des structures pour les modalités.