Pilier de l’école

Elle est arrivée en juillet dernier, « sous 45 °C » et juste après la confirmation du maintien du rectorat d’Amiens. Quarantenaire élégante, Stéphanie Dameron a quitté Paris « sans hésiter ». Puis a dû vite faire face à une crise sans précédent. Avant la fermeture des écoles annoncée le 12 mars, elle avait déjà procédé à celle des établissements du premier cluster du Covid-19, dans l’Oise. « C’était le samedi 29 février. Dès le lundi, nous étions en capacité d’assurer la continuité pédagogique dans les neuf communes concernées, grâce aux cours à distance. Il faut souligner le travail des équipes sur le terrain et de la communauté enseignante qui partout ont permis “l’accès à l’éducation“. » Un leitmotiv pour celle qui a « toujours baigné » dedans.

DES GRANDS-PARENTS INSTITUTEURS

« Mes quatre grands-parents étaient instituteurs, deux ont dirigé des collèges. Mes parents étaient professeurs de mathématiques dans l’enseignement supérieur. La transmission est un fil conducteur dans ma famille. » Professeure agrégée des universités en management stratégique à Paris-Dauphine, docteur en sciences de gestion et diplômée de l’Essec, elle dirigeait aussi jusqu’à cette nouvelle mission – « sans doute la plus belle qu’on puisse m’offrir » – une équipe de recherche CNRS. Son implication dans la gouvernance d’établissements et son expertise sur les systèmes d’éducation à travers le monde ont également conduit à sa nomination. « Permettre que tous les enfants réussissent, quel que soit leur milieu, pour tendre vers l’égalité des chances » : une vocation que le coronavirus n’aura pas ébranlée.

COMMUNIQUER AUTREMENT

« L’école est un point de repère essentiel dans la vie des familles. Il faut montrer qu’elle est toujours là malgré les circonstances. » Et la rectrice d’applaudir le syndicat mixte Somme Numérique, dont est membre Amiens Métropole, qui a financé depuis déjà plusieurs années le développement des espaces numériques de travail. « Un fait rare au niveau national. » Cet outil précieux a entretenu le lien si important entre élèves et enseignants. Stéphanie Dameron souhaite le concrétiser avant les grandes vacances. « La réouverture progressive des écoles se passe bien, la fréquentation est en hausse. Mon objectif est que tous les primaires regagnent leur classe au moins une fois d’ici le 4 juillet. Les chefs d’établissements dans le second degré sont prêts pour la reprise. » Cette période unique aura aussi fait naître de « beaux élans de solidarité entre élèves », de nouvelles façons de communiquer : « Notre page Instagram a près de 10 000 abonnés ».

L’ÉDUCATION DE DEMAIN

L’équipe du rectorat, qui a poursuivi ses missions à distance et dans ses bureaux du boulevard d’Alsace-Lorraine pendant la durée du confinement, prépare déjà la rentrée 2020, en tirant les leçons positives de ce bouleversement « pour inventer l’école de demain ». Développer le numérique éducatif et les parcours individualisés, s’appuyer sur l’autonomie des élèves, l’implication des familles... Cet été, des temps spécifiques (école ouverte, colonie de vacances apprenante, parcours buissonnier...) sont envisagés pour accompagner ce retour à l’école et lutter contre les inégalités. L’agenda chargé de la rectrice, souvent en déplacement, ne va pas faiblir. Mais elle a tout de même pu goûter à la dolce vita amiénoise. « La ville me rappelle Aix-en-Provence, où j’ai grandi : dynamique, étudiante, avec un centre-ville vivant, de bons produits maraîchers. » Une ville qui, confie-t-elle, l’a accueillie de très belle manière.

//Coline Bergeon