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En passant rue Saint-Leu, on peut facilement rater l’église Saint-Sulpice, fondue dans le bâti. Mais pas la friche industrielle attenante. Toutes deux sont désormais partiellement inscrites aux monuments historiques.

Rue Saint-Leu, des siècles imbriqués © Richard Jonvel
Le vaisseau sud, datant probablement des XIVe et XVe siècles, vu des toits voisins.
© Richard Jonvel

20.01.2021

JDA 969

Il y avait déjà le moulin Passe-Avant. Entre les canaux des Clairons et des Minimes, rue Saint-Leu, d’autres témoins du passé viennent d’être inscrits aux monuments historiques. Sur ce secteur ausculté en février 2020 par le service d’archéologie préventive d’Amiens Métropole, les époques s’imbriquent jusqu’aux années 60. Mot d’ordre de ce patchwork : l’adaptation. Le moulin à blé s’est ainsi tourné au XXe siècle vers la moutarde pour les établissements Brulé, voisins.

 

VOIE ANTIQUE ET COMMERÇANTE
De l’époque gallo-romaine, seule la chaussée antique est attestée. Pas d’habitat. Et peu d’informations pour les siècles suivants. « On sait juste que ce quartier est intégré à l’enceinte urbaine au XIIe siècle », résume l’archéologue Richard Jonvel. Des fondations mises au jour suggèrent des constructions médiévales à fonction commerciale, quand « la chaussée Saint-Leu (nommée au Bled, au Blé, ndlr) était le grand axe économique de la ville ». Cela change avec l’hôpital Sire-Liénart-Le-Sec (ou Saint-Jacques), fondé en 1314 sur cet îlot qui accueillera aussi à la fin du XVe siècle le couvent des Minimes, plus à l’est et disparu.

 

ÉGLISE OU HÔPITAL ?
L’hôpital vivra, précaire, jusqu’au XVIe siècle. Pour construire la citadelle, le faubourg Saint-Sulpice, au nord, est rasé. Son église investit l’hôpital en 1604. Ses plans sont connus : « À trois vaisseaux (lire ci-dessous, ndlr), elle est de 23 mètres de long et compte quatre travées », synthétise l’archéologue. Qu’en reste-t-il ? « La nef, dont le vaisseau nord a toujours sa charpente, pas encore datée, les fondations du chevet, des pierres sculptées, des fragments de polychromies. » Des réfections de toutes époques rendent ardue la radiographie des lieux : « La partie sud de l’église pourrait être le reliquat de l’hôpital, son ancienne chapelle ou sa salle des malades ».

 

SAUVÉE PAR L’INDUSTRIE
Démantelée à la Révolution, l’église entre dans l’ère industrielle avec une serrurerie dans le vaisseau nord. Au sud, l’actuelle maison a abrité plusieurs commerces. Derrière, sur l’ancien couvent, s’est installée une filature de lin. Puis, en 1864, vient la vinaigrerie et moutarderie Brulé, partiellement dans l’église. Sans oublier une métallurgie, d’où la grande cheminée. Et enfin, au début du XXe siècle, une teinturerie. « On doit à l’industrie d’avoir sauvegardé de nombreuses élévations de cette église, la dernière rescapée des paroisses d’Amiens déclassées à la Révolution », remarque Richard Jonvel. L’avenir de cette friche, où l’on fabriquait encore du velours en 2006, reste à inventer. Mais le cadre de conservation est posé.

//Jean-Christophe Fouquet

 

// Des éléments du passé à conserver

Selon les analyses de Michel Mathieu pour les monuments historiques, quel que soit l’avenir de la friche industrielle, quatre parties devront être conservées.

1 - Les vestiges de l’église Saint-Sulpice (murs en calcaire, arcs brisés, piles…).

Rue Saint-Leu, des siècles imbriqués © Laurent Rousselin - Amiens Métropole

© Laurent Rousselin - Amiens Métropole

2 - Les façades de la vinaigrerie face à la rue des Clairons, bâtiment de 1901.

Rue Saint-Leu, des siècles imbriqués © Laurent Rousselin - Amiens Métropole

© Laurent Rousselin - Amiens Métropole

3 - La cheminée en briques enduites et son socle, la dernière du centre d’Amiens.

Rue Saint-Leu, des siècles imbriqués © Laurent Rousselin - Amiens Métropole

© Laurent Rousselin - Amiens Métropole

4 - L’immeuble industriel à l’angle de la rue Dallery et du bras des Clairons.

Rue Saint-Leu, des siècles imbriqués © Laurent Rousselin - Amiens Métropole

© Laurent Rousselin - Amiens Métropole

 

// Une flotte de trois “vaisseaux”

Rue Saint-Leu, des siècles imbriqués © M. Peigné-Delacourt, Les Anciens monuments et vues du département de la Somme, Péronne, s.d., n.p., vue 39

© M. Peigné-Delacourt, Les Anciens monuments et vues du département de la Somme, Péronne, s.d., n.p., vue 39

Cela se voit en levant les yeux : l’église Saint-Sulpice comportait trois “vaisseaux” en langage architectural. Le clocher était sur celui de droite (au sud), actuellement une maison particulière où les murs de l’église sont apparents. Celui de gauche (au nord) arbore, lui, un graffiti de mariés. En écho au passé ?