Au fil de la passion
La fine mouche de la maroquinerie vient de publier ses premières chroniques de pêcheur en BD. Jean Lafarge, un homme aux mille facettes.
12.02.2020
JDA 939
Des crocodiles dans la maroquinerie Lafarge. Un souvenir des années 60 encore vivace dans la mémoire des Amiénois. « Mon père avait installé à l’étage un bassin avec de vrais crocodiles ! Il y avait aussi des singes et des reptiles. Des gens de ma génération me demandent toujours s’ils sont encore là. » De ce père loufoque, Jean Lafarge a hérité de quelques traits de caractère. Avant de reprendre les rênes de l’entreprise familiale bicentenaire avec ses frères en 1983, ce sixième enfant d’une fratrie de sept a bénéficié d’une position enviable – et en a profité. Contrairement à ses deux frères et quatre sœurs, il s’est librement adonné à ses passions. À commencer par le hockey sur glace. « À cette époque, je n’étais pas aussi rond ! Un vrai fil de fer qui m’a valu le surnom de Harry Covert. » Tout lui plaît dans ce sport, de l’équipement à la vitesse, en passant par la camaraderie. Dans les années 2000, il deviendra même l’assistant de l’entraîneur Dave Henderson.
DU HOCKEY À LA PÂTISSERIE
Après avoir passé son bac à New York, il file étudier le cinéma à Paris. « Je rêvais de devenir acteur. Ma nature anxieuse m’en a dissuadé. » Le jeune Amiénois vit en colocation dans le Ve arrondissement où nichent des maisons d’édition de bande dessinée, une autre de ses passions. « Comme, enfant, je lisais Michel Vaillant, mon père m’avait surnommé “Vroum vroum hi hi hi”. » Il ne manque pas une dédicace de ses idoles : Pratt, Goscinny, Van Hamme, Giraud... « Je suis né avec l’image. Mon père était président du Caméra Club Picard dont les locaux étaient chez moi, au 1, place Gambetta. » À cette époque, il s’essaye à la vente pendant deux ans dans une boutique parisienne d’articles de sport, la seule à vendre alors des planches de surf. Suite à une peine de cœur, il retourne à New York travailler à La Grenouille, grand restaurant sur la Cinquième Avenue, tenu par son ami Charles Masson. « Avec mes copains, architecte et dessinateur, on a fabriqué un faux diplôme de pâtissier pour les autorités américaines. Et j’ai pu travailler là-bas quelques mois, on m’appelait Johnny Cake. »
BIENTÔT LA NOUVELLE-ZÉLANDE
De retour à Amiens à la trentaine, il prend avec ses deux frères la succession de son père et se marie. Il partage alors son quotidien entre ses huit boutiques – Amiens, Compiègne, Rouen, Reims, Montpellier, Béziers –, ses quatre filles et sa canne à pêche. « J’ai découvert la pêche à la mouche tardivement grâce à un ami. Une révélation ! » Il dévoile cet engouement dans ses chroniques de moucheurs picards Des hommes qui lisent les rivières. « J’avais des pages et des pages de récit de mes pêches et je voulais les rassembler, mais pas dans un livre. La BD m’est apparue la bonne solution. » Avec ses amis Charles Masson et Philippe Bonon (toujours !) pour les illustrations, il croque ses compagnons de pêche. Seul à la barre de la maroquinerie depuis cinq ans, Jean Lafarge pense à passer le relais à sa fille Pauline. D’ici deux ans, peut-être trois... « Je recule toujours la date mais bon, je saurai m’éclipser. » Sa prochaine aventure ? Les rivières de Nouvelle-Zélande avec ses amis fines mouches Jérôme, Nonos, Stef, Denis, Jean-Luc. De quoi alimenter un deuxième tome.
//Stéphanie Bescond