Quand le jazz est roi
Un spectacle sur Oscar Peterson, un premier album et d’autres partitions à venir : le pianiste et écrivain Romain Villet envoie du swing.
24.11.2021
JDA 996
Il nous a tenus en haleine en 2019 au Festival Basse-Cour de Poulainville avec son Cardio-Jazz, ovni musical philosophico-sportif. Au piano, Romain Villet y improvisait aux côtés du contrebassiste Bertrand Blandin, au rythme des battements de cœur de Sam Savreux, comédien-cycliste en plein pédalage. L’écrivain et pianiste s’y produira de nouveau, le 26 novembre, avec My Heart belongs to Oscar !, hommage au maître du swing Oscar Peterson.
LA JOIE DE VIVRE
« Il y a dans la musique de ce pianiste à la virtuosité démente un enthousiasme génial », glisse ce touche-à-tout. Cette joie de vivre contagieuse, Romain Villet la partage avec le géant : « Sa réponse à la ségrégation, malgré sa notoriété, n’était pas la revendication mais l’exercice de son art. Je ne suis pas plus revendicatif par rapport à ma cécité. J’ai l’impression de faire beaucoup pour la cause à travers la musique ou l’enseignement ». Cette déclaration d’amour, publiée en 2019 aux éditions Le Dilettante, Romain Villet l’esquisse dès son arrivée à Amiens, il y a cinq ans, et la porte avec ses amis Émilien Legendre et Olivier Michel, avec qui il a « arpenté les clubs de jazz à haute dose » à Paris.
UN PENCHANT POUR L’IMPRO
Le quarantenaire clame son penchant pour l’improvisation musicale à plusieurs : « Cette communication non-verbale est l’une des plus grandes voluptés de ma vie ». Le piano, il le caresse depuis 1983. « J’ai perdu la vue à 4 ans. Face au désarroi de mes parents, mon parrain leur a conseillé de me mettre un piano entre les mains. » Douze ans de formation classique au Conservatoire, à Paris. Une pause à l’adolescence. Puis la révélation à 20 ans, en suivant une amie à un cours de jazz. L’étudiant à Sciences Po s’y plonge corps et âme, troque sa thèse de philo politique contre le clavier, tout en continuant à lire et à rédiger. « J’ai toujours voulu écrire », pointe ce friand d’anagrammes, de Céline et de Giono, également passé par le Centre de formation des journalistes et les studios de France Culture. Chez lui, musique, littérature et philo (sa femme Élise est docteure en la matière) se répondent, provoquent une jubilation qu’il transmet dans ses cours à l’école supérieure de commerce et lors de conférences. Son premier roman, Look, a été publié en 2014 (lire ici l’article du JDA #846) par Gallimard. Des nouvelles de l’amitié, recueil auquel il a contribué, vient de paraître chez Terres de l’Ouest. « J’ai trois ouvrages en route mais peu de temps... »
DES RENCONTRES FRUCTUEUSES
Car la musique a pris le dessus. Romain a sorti, fin octobre, En Somme, le premier album de son Trio 109, dont il signe la moitié des compositions et la production. « Ma rencontre avec Nicolas Lefèvre et Fabrice Leroy est l’un des heureux événements de mon arrivée à Amiens, assure le père de famille qui sera aussi au casting du prochain spectacle de la Cie Le Poulailler. Je suis ravi de vivre ici et d’y avoir fait mon trou rapidement. » Joyeux et talentueux, indiscutablement.
//Coline Bergeon