Ils veulent sauver la tombe du papa de Bécassine
Joseph Pinchon, créateur du personnage de Bécassine, repose au cimetière de Saint-Acheul. Une association appelle aux dons pour restaurer sa sépulture.
26.11.2025
JDA 1135
Au cimetière de Saint-Acheul, il y a les somptueux caveaux de Victor Pauchet, d’Henri Devred et des leurs. Et même un Rodin, un vrai, voulu pour sa sépulture par le jeune poète Marius Sourisseau. Un standing à l’opposé de cette tombe contre la haie d’enceinte, rongée par le temps, plaque de marbre en miettes. Celle de Joseph Pinchon. Le nom a disparu. D’ailleurs il ne dirait pas grand-chose au grand public. À l’opposé du personnage qu’il a dessiné : Bécassine. La célèbre servante bretonne, iconisée par Chantal Goya, a donc un papa picard, mort en 1953 sans descendance, au point que sa sépulture est laissée à l’abandon.
Un tiers des 25 000 € récoltés
Enfin presque. Car des gens émus de cet oubli, il y en a depuis longtemps. Les choses se sont accélérées ces derniers mois avec la création de l’Association de sauvegarde du patrimoine sépulcral. « Nous avons d’abord retrouvé des cousins très lointains de Pinchon qui nous laissent agir, raconte l’un des initiateurs d’un appel aux dons, Pierre-Louis Vasselle, noyonnais comme la mère de Pinchon. Il nous faut 25 000 € pour refaire la grille, la stèle et une nouvelle plaque funéraire. Nous avons déjà récolté le tiers. » Les premiers travaux pourraient commencer début 2026. Pierre-Louis Vasselle rêve à terme d’un circuit mémoriel pour ne plus ignorer la présence de Pinchon à Amiens, là où il a vu le jour en 1871, là où il a habité rue Duthoit puis rue Gribeauval. Pinchon, un peu moins oublié dans l’Oise, lui qui a des liens forts aussi avec Clairoix où il passait ses étés en plus de Noyon, où son père avait repris la tannerie de son beau-père en 1887.
« Mémé des bédéphiles »
Pinchon invente Bécassine en 1905. La rédactrice en cheffe du journal pour petites filles La Semaine de Suzette comble une page blanche en plein bouclage par une histoire inspirée des bêtises de sa servante bretonne. Pinchon lui donne les traits que l’on connaît. L’aventure Bécassine durera pour lui jusqu’en 1950. Une héroïne montrée du doigt par certains qui y voient une naïve, sans bouche, véhiculant les préjugés sur les Bretons. Mais admirée par d’autres car cette femme s’instruit, conduit, fait du sport... Le critique de BD belge Robert Rouyet mettra tout le monde d’accord : « Qu’on le veuille ou non, elle est la mémé de tous les bédéphiles ». Ça vaut bien une tombe décente.
Antoine Caux
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