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Contre les fuites, des chiens chasseurs de chlore

Du 2 au 5 mai, des chiens spécialisés ont actionné leur truffe au-dessus de 20 km de canalisations d’Amiens Métropole. Une méthode de recherche expérimentale qui semble porter ses fruits.

Contre les fuites, des chiens chasseurs de chlore © Laurent Rousselin

09.05.2023

Trouver des fuites, ça demande du flair. Après l’imagerie satellite ou l’injection de gaz neutre, une autre méthode de détection vient d’être testée du 2 au 5 mai sur 20 km de canalisations du réseau d’adduction (entre les points de captage et les châteaux d’eau) d’Amiens Métropole. Soit presque la moitié de ces gros tuyaux en fonte qui alimentent le territoire – et où des fuites peuvent engendrer de grosses déperditions.

Aux manettes, les équipes de K9 et Kyroc, venues du sud de la France avec quatre chiennes spécialement entraînées à détecter le chlore. Et qui dit chlore, dit fuite. Ou fuite en approche… En effet, les chiens ne se contentent pas de déceler des flaques chlorées. Ils peuvent aussi sentir si une jointure montre des signes de faiblesse.

 

« Faire du préventif, c’est très bien ! approuve Éric Maquet, vice-président d’Amiens Métropole délégué à la protection de la ressource en eau. Généralement nous travaillons dans le curatif car il faut gérer les urgences. » En effet, le réseau avoisine les 30 % de déperditions. D’où une hausse du budget de gestion de l’eau (hors assainissement) en 2023 : « Nous sommes à environ 11 M€, soit quasiment le double qu’avant ».

La campagne de détection menée avec ces chiennes – qui sillonnent le pays pour répondre à une demande croissante – a engendré environ « 40 marquages, précise François Bourdeau en caressant l’une d’entre-elles. Nous allons ensuite les analyser plus finement en visionnant des bandes, car nous filmons tout ce que font les chiennes et observons leur comportement ». Enfin, l’entreprise transmettra un rapport à la collectivité, laquelle croisera les données.

Comment ça marche ?

Les chiens sont entraînés à détecter le chlore. « Cela prend du temps, et, selon les terrains, je continue d’en apprendre tous les jours, explique le cynotechnicien. Mes chiens n’avaient ainsi jamais été confrontés au colza. » Une fois sur place, le maître agite un flacon sous le nez des bêtes pour leur signifier que la chasse est lancée. Si le chien marque une fuite, il a droit à sa balle. « Pour le chien, il s’agit d’un jeu. La complicité entre l’homme et l’animal se développe ainsi. » Néanmoins, l’exercice est rigoureux, il s’agit donc de changer de chien toutes les demi-heures, et d’en faire passer un autre en cas de doute.

Tout cela relève encore de l’expérimental. François Bourdeau peaufine ses services depuis deux ans. Deux de ses chiennes, un berger allemand et un berger belge malinois, sont déjà rodées. Une troisième, croisement de border collie et fox-terrier récupérée à la SPA, suit sa formation. Puis ce sera à la petite dernière, un jeune beagle. Toutes partiront en retraite assez tôt. « Ce qui compte, c’est le chien ! », affirme le spécialiste, très protecteur.

 

La semaine amiénoise de K9 et Kyroc avait été balisée par les services de la collectivité : marquage du parcours des canalisations et préparation du terrain par désherbage et débroussaillage. Ce travail préparatoire salué par François Bourdeau a porté ses fruits, tant les chiens semblent avoir fait leurs preuves sur ce parcours où pullulent les “points sourds”, c’est-à-dire des endroits où l’écoute classique par les techniciens est souvent insuffisante (d’où le recours à l’imagerie ou au gaz).

 

Cette nouvelle méthode de détection se profile comme « plus efficace et précise, mais aussi moins onéreuse » que les autres, estime Franck Pieters, chef d’unité exploitation, captage et stations d’épuration d’Amiens Métropole. Ces chiens à la pointe du chlore pourraient donc de nouveau parcourir les champs qui entourent la ville. Mais pas tout de suite. Les éventuelles interventions qui résulteront de leur travail ne seront pas programmées avant l’année prochaine. En 2023, le service des eaux affiche complet.

Jean-Christophe Fouquet