Votre navigateur est obsolète!

Mettez à jour votre navigateur pour afficher correctement ce site Web. Mettre à jour maintenant

×

Le 23 mai 1882, se tenait pour la première fois place Parmentier le « Marché sur l’eau ». Symbole des activités maraîchères amiénoises de la fin du XIXe siècle - début du XXe siècle, ce marché d’antan a connu de belles heures que les Archives municipales et communautaires d’Amiens vous proposent de (re)parcourir.

Le marché sur l'eau, place Parmentier à Amiens. © 5Z898, Archives municipales et communautaires d'Amiens
Le marché sur l'eau, place Parmentier à Amiens.

02.05.2019

A partir des années 1880, dans un souci d’amélioration et de rénovation, le quartier dit « des Bondes », correspondant à une partie de l’actuel quartier Saint-Leu, fait l’objet d’un certain nombre d’aménagements. Par exemple, par un décret du 9 juin 1879, il est décidé de réaliser une voie de communication reliant la place du Don au port d’Amont. En 1881, des travaux débutent place des Bondes afin d’aménager une place située entre les ponts du Cange et de la Dodane. Ce nouvel espace, longeant la Somme, est destiné à accueillir un « marché aux légumes » qui était organisé jusqu’alors le long du bras du Don par les hortillons d’Amiens. Pour cela, un débarcadère pour bateaux doit être construit. Afin de donner un aspect agréable à la place et de procurer de l’ombrage aux hortillons, des marronniers sont plantés. A la fin de l’année 1881, cette nouvelle place est dénommée Parmentier, en l’honneur d’Antoine Parmentier (1737-1813), agronome picard et promoteur de l'usage de la pomme de terre. C’est dans ce contexte que la place Parmentier est créée et va permettre l’institution du Marché sur l’eau. Le 23 mai 1882, les hortillons s’y installent pour la première fois afin de vendre les légumes et les fruits en provenance des 300 hectares des Hortillonnages. A sa création, le « Marché sur l’eau » n’est pas désigné ainsi par les Amiénois mais fréquemment appelé « marché du Don », « marché aux légumes » ou « marché des Bondes ».

Hortillonnes, hortillons : chacun avait un rôle à tenir. Traditionnellement, la veille des jours de marché, les maraîchers chargeaient leurs barques à cornet de fruits et légumes depuis les Hortillonnages. Afin de maintenir la fraicheur des récoltes, celles-ci étaient recouvertes de foin ou de roseaux coupés. Les hortillons accostaient de nuit au port d’Amont, attendant de passer le pont du Cange qu’ils ne pouvaient franchir qu’à l’ouverture du marché. Il n’était pas rare de voir se former des « bouchons » de bateaux à cet endroit. A l’aube, les barques à cornet se rangeaient le long du quai place Parmentier où les hortillons s’affairaient pour décharger leurs cargaisons. Chargées de vendre les productions maraîchères, les hortillonnes entraient en piste. Elles fixaient les prix des produits selon les cours du jour. D’ailleurs, on disait des hortillons qu’ils faisaient « la marée », en raison des prix qui augmentaient ou baissaient d’un jour sur l’autre. En tenue traditionnelle (composée d’un jupon, d’un tablier et d’une coiffe, la « capeline »), elles assuraient les transactions.

Ayant lieu trois fois par semaine à l’aube (les mardis, jeudis et samedis), le Marché sur l’eau attirait de nombreux Amiénois. Cela peut se vérifier sur les plaques de verre et cartes postales laissées par nos ancêtres. Son succès s’expliquait par la diversité des fruits et légumes vendus : navets, radis, carottes, asperges, poireaux, fèves, haricots, artichauts, concombres, épinards, fraises, cassis, groseilles, prunes, pommes, poires, etc.

Près d’un millier au début des années 1900, les hortillons ont vu leur profession décliner tout au long du XXe siècle. En cause, une diminution des maraîchers et une nouvelle façon de consommer avec l’apparition des grandes surfaces commerciales. Le marché sur l’eau a aussi connu de profondes évolutions. Durant la Seconde Guerre mondiale, un manque de main d’œuvre est attesté, accompagné d’un constat de récoles insuffisantes. De plus, l’armée allemande, qui occupe Amiens depuis le 20 mai 1940, est accusée d’acheter régulièrement les marchandises avant l’heure d’ouverture réglementaire du marché. Ces situations entraînent des problèmes d’approvisionnement en légumes à Amiens. Afin de limiter ces difficultés, la municipalité amiénoise met en place, à partir de 1941, un système d’encadrement des prix et de répartition des récoltes entre grossistes et revendeurs.

A partir de la seconde moitié du XXe siècle, les camionnettes ont remplacé progressivement les traditionnelles barques à cornet. Ainsi, l’acheminement des denrées ne se faisait plus par bateaux. De plus, réduit à deux jours par semaine (les jeudis et samedis), le marché sur l’eau a vu le terme d’hortillon être parfois délaissé au profit de celui de « grossiste ».  En 1975, l’axe Est-Ouest passant par le quartier Saint-Leu est en cours de réalisation, occasionnant le percement de la partie comprise entre le Pont Beauvillé et la rue Saint-Leu. Ce nouveau tracé, ouvert à la circulation routière, emprunte la place Parmentier. En raison du stockage gênant des marchandises sur l’espace public et le stationnement des véhicules de livraison sur la route, le Marché sur l’eau engendre des problèmes de circulation. Il est alors transféré à la zone industrielle de Longpré à Amiens-Nord, après sa dernière édition place Parmentier le 29 mai 1976. Mais cette décision n’entraine pas la disparition du marché, comme le mentionne Paule Roy dans le tome 1 de Chronique des rues d’Amiens : « Et pourtant le Marché sur l’eau n’est pas mort […] il n’en reste pas moins que le jeudi et le samedi, à partir de 5 heures du matin, des maraîchers sont là avec leurs produits tout frais […] ».

De nos jours, quelques maraîchers continuent de vendre leurs produits chaque samedi matin, place Parmentier. Le marché sur l’eau traditionnel, tel qu’il était organisé jadis, se déroule une fois par an dans le cadre de la Fête dans la Ville en juin. Dans des barques à cornet chargées de légumes, de fruits et de fleurs, les hortillons en tenue d’époque descendent la Somme jusqu’à la place Parmentier.

Notre Trésor d’Archives est une carte postale en noir et blanc, datant de la première moitié du XXe siècle. Sur celle-ci, se tient le Marché sur l’eau place Parmentier. A gauche du document, une hortillonne portant un tablier blanc regarde l’objectif du photographe. Face à elle, des Amiénois arpentent ses étals. Au centre, sur la Somme, sont accostées les barques à cornet des maraîchers. Plusieurs éléments du quartier Saint-Leu sont visibles tels que pont de la Dodane, le clocher de l’église Saint-Leu et le quai Bélu.

Le document :

Cote archives : 5Z898

Technique : carte postale noir et blanc

Dimension : 13,7*9

Conditions de conservation : conservé à l’abri de la lumière, dans une pochette polyester transparente perforée neutre adaptée au format, au sein d’une boîte-classeur neutre. Photographie numérique conservée sur serveur informatique.

Description : carte postale du Marché sur l’eau, à Amiens, datant de la première moitié du XXe siècle.

Pour consulter plus de documents sur le sujet, rendez-vous sur Facebook : @ArchivesMunicipalesAmiens