Étienne de Fay, sourd et pionnier
Et si l’un des précurseurs de la langue des signes était amiénois ? La vie du méconnu Étienne de Fay (1665-1746) se dévoile à Louis-Aragon.

10.09.2025
JDA 1126
Sourd de naissance, Étienne de Fay devient pensionnaire de l’abbaye Saint-Jean-des-Prémontrés – désormais espace Dewailly – à 7 ans. Il y restera jusqu’à sa mort, en 1746, à 80 ans. Avec le titre d’écuyer, sans jamais entrer dans les ordres : sa surdité le lui interdisait. En revanche, il y aura appris à lire, écrire, compter, dessiner. Jusqu’à l’érudition. Il fut l’auteur des plans de l’agrandissement de l’abbaye, en 1712. Et « la première personne sourde à avoir transmis une connaissance en langue des signes », pointe Emmanuelle Berthiaud, de l’Université de Picardie Jules-Verne, l’une des trois commissaires de l’exposition qui lui est consacrée à la bibliothèque Louis-Aragon. La méthode de l’Abbé de l’Épée ne sera publiée qu’en 1776.
L’émancipation par l’éducation
Étienne de Fay a laissé plusieurs manuscrits et dessins, ainsi que des témoignages de contemporains intrigués. « Il garde pourtant une part de mystère, poursuit Audrey Duru, également commissaire. En devenant enseignant, il est sorti du statut d’éternel mineur auquel étaient réduites les personnes sourdes. Mais fut-il heureux ? Et quels signes utilisait-il ? ». Cette « page méconnue de l’histoire locale », comme l’exprime Pierre Savreux, le vice-président d’Amiens Métropole délégué à la culture, mérite d’être feuilletée : « À une époque où les personnes sourdes étaient marginalisées, Étienne de Fay a prouvé l’importance de l’éducation ». Une plaque en son honneur sera inaugurée le 20 septembre à 11h30 à l’espace Dewailly. Sa maison.
Jean-Christophe Fouquet
Sur les traces d’Étienne de Fay, être sourd à Amiens au XVIIIe siècle Jusqu’au 31 octobre À la bibliothèque Louis-Aragon |