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« Avec Pierre Garnier, il y a un côté cosmique et en même temps très ancré »

À l’occasion du 10e anniversaire de la mort du poète spatialiste Pierre Garnier, un hommage lui est rendu les 2 et 3 avril à la Comédie de Picardie. Rencontre avec l’un de ses admirateurs : Marc Monsigny, chanteur picard qui lira des poèmes.

Pierre Garnier © Pierre Garnier

26.03.2024

Depuis 2016, la bibliothèque de Camon porte son nom : Pierre Garnier. Et sur son fronton : ces mots qui semblent s’échapper. Pierre Garnier, né dans le quartier Saint-Roch en 1928, décédé en 2014, fut le créateur avec son épouse, Ilse, du spatialisme, une poésie visuelle où les poèmes, par la disposition des mots, se muent en expérimentation. Pierre Garnier expliquait que la hiérarchie des phrases ne correspondait pas à la beauté de la nature. « “Le paysan laboure son champ” introduit un ordre antipoétique parce qu’il introduit le maître et l’esclave. Le spatialisme remplace cet ordonnancement du monde par des constellations de mots. » Il écrira plus tard : « Le poème spatial est composé d’éléments linguistiques – mots, syllabes, lettres – disposés sur la page de telle sorte qu’ils fassent ressortir leurs présences les uns par rapport aux autres et qu’ils forment une unité de beauté poétique et de sens. Un objet linguistique lyrique ».  Tout un poème.

Spatialisme, révolution poétique

Marc Monsigny lisant Pierre Garnier © Antoine Caux Pierre Garnier © Antoine Caux

Connu et reconnu en Allemagne ou au Japon, Pierre Garnier est sans doute moins prophète en son pays. C’est d’ailleurs outre-Rhin qu’il avait fait ses études de 1946 à 1950 avant de rentrer à Paris, avant de rencontrer Ilse. Ils fréquentent alors Elsa Triolet et Louis Aragon. On est à la fin des années 1950 et se dit lassé de la poésie traditionnelle. Début 1960 : le pop art et la musique électro acoustique frappent à la porte. Youri Gagarine part en orbite. L’époque est à la révolution. La poésie n’y échappe pas. Le spatialisme naît : « Le but est de séparer les mots de la phrase et de faire éclater la phrase elle-même. Il faut un vide pour que le lecteur perçoive les tensions qui s’établissent entre les différents mots », définissent les époux Garnier.

« Les mots sont des oiseaux et les oiseaux sont des mots »

La bibliothèque de Marc Monsigny regorge des impressionnantes œuvres de Pierre Garnier. Marc Monsigny, chanteur picard, avait croisé Pierre Garnier à la cité scolaire. Le premier était un petit lycéen, le second, un professeur d’allemand à l’aura certaine. « Il était surnommé Ch’bison : un mec avec une sacrée carrure, des cheveux longs impeccables à une époque où nous avions, nous, tous les cheveux longs et plutôt sales. » Marc Monsigny se fascinera pour les poèmes de Garnier quitte à ressentir quelques regrets. Ceux de ne « pas avoir assez fréquenté le bonhomme ». Marc Monsigny, qui avait choisi des textes de Garnier pour un spectacle où il était accompagné au piano, est incollable : « Pierre Garnier, ce n’est pas du calligramme comme faisait Apollinaire, c’est encore autre chose », en nous lisant le poème Visible invisible. « Ça chenille pour que le mot invisible devienne le mot visible. Chez Garnier, il y a un côté cosmique, métaphysique. Et en même temps, c’est très ancré dans un territoire. Il était très sensible à la Picardie. Pas pour la défendre ni par régionalisme. Mais pour la regarder avec les bonnes lunettes. Il montre les liens entres les humains, les animaux, le végétal, le minéral, que tout est relié. » D’ailleurs Pierre Garnier écrivait « Les mots sont des oiseaux et les oiseaux sont des mots ». Marc Monsigny a été choisi par Violette Garnier, la fille de Pierre et Ilse, pour lire des textes les 2 et 3 avril, au bar de la Comédie de Picardie à 18h30.

Antoine Caux

 

Marc Monsigny nous lit ici un poème de Pierre Garnier.

Pierre Garnier © Antoine Caux